Le danger est toujours présent

Suite au mouvement du sol survenu le 6 juin dernier à Kicroix, plus d’un s’est interrogé sur l’origine de ce phénomène et sur l’attitude à adopter par les habitants de cette localité. Une délégation du bureau des Mines et de l’Energie, à la demande de la direction de la Protection civile du ministère de l’Intérieur s’est rendue mardi 12 juin sur le site en question en vue de faire des observations de terrain. Claude Prépetit, Hermin Jean-Louis, Marceau Jean-Baptiste et Daniel Saint-Louis ont élaboré un rapport de circonstance.
 
La zone affectée par le mouvement de terrain est localisée à Bongars, environ 5 km au sud-ouest de Kenscoff, à la deuxième section communale de Kenscoff. Le rapport révèle que les localités touchées par le mouvement sont Kicroix, Boucambour et Saint-Antoine. L’accès se fait par la route en terre battue qui mène au Montcel. La zone en question n’est pas accessible directement par les véhicules, il faut s’y rendre à pied.
 
Dans la zone affectée par le glissement, les experts disent remarquer des calcaires broyés de l’eocène qui sont recouverts par des sols latéritiques de couleur rougeâtre de 1 à 2 m d’épaisseur (même plus). Ces derniers sont très sensibles à l’eau et peuvent être lessivés facilement par des eaux de ruissellement, ce qui est susceptible de créer des coulées boueuses, rapportent-ils.

 « Dans ces types de mouvements de terrain, poursuit le rapport, il y a lieu de considérer les facteurs naturels et les facteurs de déclenchement. Parmi les facteurs naturels, il y a lieu de signaler surtout : la topographie, la géologie et l’hydrologie. La zone où a lieu le glissement – est très escarpée (40 % de pente), la géologie est caractérisée par des sols latéritiques rouges peu épais reposant sur des calcaires très fracturés et broyés.

Le facteur de déclenchement est bien sûr la pluviométrie. De mars à mi-mai, il a beaucoup plu dans la zone. L’eau s’est accumulée dans les sols latéritiques très sensibles et il s’en est suivi un mouvement gravitaire.

De plus, la zone touchée par le glissement est située à 25 km à l’est de l’épicentre du séisme du 12 janvier 2010. Elle a été fortement secouée par ce séisme. Il est probable que de telles secousses aient pu réactiver ces anciens glissements qui se sont manifestés pendant la période de fortes pluies. »

 Impact du glissement

D’après les informations recueillies sur place par les experts, les maisons de 10 familles ont été endommagées par le glissement. Des routes ont disparu et beaucoup de jardins de maïs, de choux, de pois, de carottes, etc. sont perdus. Il n’y a pas eu de pertes en vies humaines. L’environnement de la zone est aussi perturbé. Une évaluation exhaustive des pertes est en train d’être finalisée par le Casec de la zone.

 Recommandations des géologues

Les zones de fissures observées en amont du point à partir duquel a lieu le glissement et sur lesquelles se trouvent encore des maisons, sont à évacuer. Nous sommes en plein dans la saison pluvieuse, il faut s’attendre à une amplification du phénomène dans les mois à venir. Il est important d’établir un cordon de sécurité autour de la zone et d’interdire toute nouvelle construction dans les localités de Kicroix et de Saint-Antoine jusqu’à ce que le mouvement soit stabilisé et mieux identifié. Les fissures observées doivent être surveillées régulièrement jusqu’à la fin de la saison pluvieuse et une campagne de géophysique serait intéressante à mener dans la zone pour évaluer la profondeur de la surface de rupture. A cet effet, le BME pourrait se faire assister par l’ IMSRN, moyennant que des fonds soient trouvés pour une telle étude.

 
Source: Rapport sur le glissement de terrain survenu à Kenscoff/Bongars, élaboré le 12 juin 2012, par l’ingénieur géologue Claude Prépetit.

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La terre s’ouvre à Kikwa

La terre s’est fendue dans différents endroits, à Kikwa, une localité de Kenscoff. Ce mouvement du sol a endommagé au moins trois maisons, selon la coordonatrice du Mouvement des femmes haïtiennes pour le développement rural (MOFHADER), citée par Radio Signal fm. La responsable a tout de suite lancé un appel pressant à l’attention des autorités « en vue d’éviter le pire ».
 
C’est avec beaucoup d’étonnement que la population de Kikwa a assisté le 6 juin à cet étrange phénomène naturel. Les habitants de cette localité reculée de la commune de Kenscoff ont fait savoir que cela s’est passé aux environs de huit heures du soir en provoquant beaucoup de bruit. Cette situation a jeté un vent de panique au sein de cette population qui a dû, cette nuit-là, se refugier sur un vaste terrain, selon ce qu’a rapporté le photographe Yonel Louis, qui a accompagné une délégation du ministère de la Planification en visite là-haut la semaine écoulée.
 
Ce phénomène, vécu pour la première fois, les a laissés complètement perplexes. Le député de Kenscoff, Louis André Gustave dont le père habite la zone, s’y est rendu pour évaluer la situation et a demandé aux habitants d’évacuer. Ces derniers ont été hébergés ailleurs par leur famille ou des voisins. Le député a fait appel à la ministre de la Planification et de la Coopération externe, Josépha Gauthier, qui a tout de suite envoyé des kits de nourriture pour les sinistrés, selon Yonel Louis. Puis, le samedi 23 juin dernier, la ministre, accompagnée du député Gustave, a rendu personnellement visite à la population de cette localité pour constater elle-même l’ampleur des dégâts et distribuer les kits.
 
Les responsables ont pu relever qu’il faut emprunter une route extrêmement dangereuse pour se rendre à Kikwa où la population les a chaleureusement reçus, toujours selon notre photographe. Toutefois, ces citoyens n’ont pas manqué de critiquer le ministre de l’Environnement et les autorités haïtiennes en général, qui les ont complètement laissés de côté. Ces habitants se sont, malgré tout, réjouis de la visite de Mme Gauthier qui a promis de leur faire construire bientôt des abris provisoires et d’installer des lampadaires sur la route.