Echanges captivants sur la littérature et les aspirations littéraires

La journée du vendredi 3 février à l’institution Saint-Louis de Gonzague, à Delmas 33, ne s’est pas déroulée comme toutes les autres pour les élèves de cette école. L’auditorium Saint-Louis s’est paré de ses plus belles décorations pour accueillir les écrivains Léonora Miano et Dany Laferrière dans une atmosphère de joie et de gaieté. Une rencontre enrichissante a eu lieu entre ces jeunes et les deux étonnants voyageurs.

Les élèves du secondaire de l’institution Saint-Louis de Gonzague, auxquels se sont joints ceux des institutions Mère Délhia et Vision nouvelle, ont eu d’intéressants échanges avec les écrivains Dany Laferrière et Léonora Miano, qui leur ont rendu visite dans le cadre de leur tournée d’étonnants voyageurs. Les discussions ont surtout porté sur les oeuvres respectives de ces écrivains.

L’origine et l’objectif de ce festival de littérature et de cinéma ont d’abord été au centre des préoccupations de ces élèves, manifestement accrochés à la lecture.  Puis, ils ont fait montre de leur envie d’en savoir plus sur ces auteurs dont ils se sont empressés de connaître la biographie et la bibliographie. Tour à tour, de multiples questions ont été adressées aux deux invités, qui se sont fait le plaisir de plonger ces jeunes dans leur monde réel et littéraire.

Contents de la vivacité d’esprit des élèves, ils se sont très vite transformés en professeurs qui enseignent à ces derniers comment devenir écrivain. Beaucoup de ces jeunes semblent aspirer à ce métier, mais se demandent s’ils ont quelque chance de réussir ou s’ils sont sur la bonne voie.

La leçon est pourtant très simple, selon les deux auteurs. Pour Dany, il suffit de le vouloir  vraiment. L’essentiel n’est pas de se demander si l’on peut le faire, mais de le faire tout simplement. Le premier talent est la persévérance, a expliqué celui qui a écrit 22 ouvrages littéraires en 30 ans. Il aimerait encore faire mieux, mais des nuits d’angoisse attendent, prévient-il. « Qui va aller plus loin dans ce tunnel ? », s’interroge t-il pour montrer  que l’écriture constitue vraiment un véritable chemin sans aboutissement. « Un chemin un peu solitaire, et on n’a pas vraiment besoin de conseils pour l’emprunter ».

Léonora pense, quant à elle, qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un écrivain modèle. Il faut trouver sa propre voie, sa propre singularité. La seule leçon à tirer des grands  auteurs, selon elle, n’est pas de les imiter, mais de s’en servir comme crayon pour tracer son propre sillon. Le seul conseil est de continuer, si l’on a déjà commencé, et de persévérer. Il n’y a pas vraiment de règle, sinon que d’écrire sans cesse et d’attendre qu’on soit prêt pour la publication. Rien que ça ! Tels sont les conseils prodigués par l’auteure dont le livre préféré est toujours celui qu’elle n’a pas encore écrit.

L’intérêt des élèves  pour ces réflexions littéraires augmentait au fur et à mesure que les écrivains répondaient à leurs diverses questions. Interrogés sur certaines de leurs œuvres, ils  fournissent toutes les explications nécessaires avec patience et modestie, tout en s’assurant de la compréhension de ces jeunes. 

Réagissant sur son livre « Tout bouge autour de moi » retraçant le séisme de 2010, Dany Laferrière pense qu’il fallait absolument en rendre compte. « C’était aussi important que panser les blessures des victimes », dit l’auteur, pour qui l’œuvre en question constitue une relation d’amour entre lui et sa ville. 

Il habite l’Amérique. Dany Laferrière aime dire que son « cœur est à Port-au-Prince, son corps à Miami et son âme à Montréal. » Façon bien personnelle d’habiter l’Amérique tout entière !

Quant à Léonora Miano, née en 1973, à Douala au Cameroun, elle réside en France depuis 1991. L’écriture, dit-elle, est simplement une chose qui lui est arrivée sans qu’elle puisse l’empêcher. Pour Miano, on écrit en raison d’une certaine tournure d’esprit et parce qu’on y est poussé. Elle est l’auteure de plusieurs romans, qui ont remporté divers prix, et également de nombreux textes courts.

Léonora Miano et Dany Laferrière n’ont pas été les seuls à avoir rencontré des élèves. 20 auteurs au total sont allés à la rencontre des élèves de 10 collèges et lycées de la capitale. Cette série de rencontres a débuté dès jeudi avec Yahia Belaskri, Georges Castera, Ernest Pépin, Inéma Jeudi, Yvon Le men et Michel Le bris qui ont visité des collèges et lycée de Port-au-Prince, de Delmas, de la plaine du cul-de-sac, de Pétion-Ville, etc.  Tout cela s’inscrit dans le cadre du festival « Étonnants voyageurs » qui a lieu en Haïti du 1er au 4 février 2011. 

Grave incendie dans un camp d’hébergement

Un incendie a éclaté, ce mercredi, dans le camp d’hébergement situé sur la cour de l’Ecole nationale République d’Argentine, à Carrefour Péan, semant la panique parmi les sinistrés. Une fillette de 3 ans a été brulée, deux autres enfants sont portés disparus et au moins une cinquantaine de tentes ont été consumées par le feu.

Il est dix heures du matin et la circulation est un peu difficile à la rue Saint-Martin prolongée. Cette rue mène à l’Ecole nationale République d’Argentine, autrement dit au camp des déplacés de Carrefour Péan où un incendie vient de se déclarer un peu avant huit heures du matin. Avertis au téléphone par des résidents du camp, les pompiers de la mairie de Delmas arrivent bien vite sur les lieux pour éteindre le feu, mais ne peuvent éviter les dégâts. Une ambulance de la Croix-Rouge haïtienne et des brigadiers d’action civique sont venus apporter les premiers soins aux victimes.

Dans le périmètre où était érigé environ une trentaine de tentes, il ne reste plus que les débris de tôle, la cendre des planches et la noirceur des objets brûlés. La population du site et de la zone avoisinante assiste, impuissante, à la scène, ne pouvant que déplorer les pertes matérielles.

Une atmosphère de désolation totale règne sur le site où la solidarité, heureusement est présente, les uns compatissent à la douleur des autres. Le cadavre d’une fillette de trois ans, brûlée vive à l’intérieur de sa tente, est retrouvé dans les ruines. Sa mère, qui s’est rendu à Canaan, ne le sait pas encore, rapporte les voisins. Son père, en sanglots, explique qu’il était sorti chercher de l’eau lorsque l’incendie s’est produit.

Deux autres enfants sont portés disparus et leurs parents sont inconsolables. Les responsables essaient d’organiser des réunions avec les voisins pour savoir s’il y a des habitants du camp qui manquent à l’appel. La police canadienne et des Casques bleus brésiliens viennent renforcer la PNH présente sur les lieux. Le maire de Port-au-Prince, Jean Yves Jason, qui est sur place n’a pas de mots pour exprimer sa tristesse. De son côté, le secrétaire d’Etat à la Sécurité publique, Réginald Delva, promet de diligenter une enquête pour faire la lumière sur cet incendie dont l’origine est jusque-là inconnue.

Le feu a éclaté chez M. Eddy Auguste : « Il n’y avait personne à la « maison » et la porte était fermée à clé», affirme celui-ci, ne pouvant fournir aucun détail sur l’origine de l’incendie et doutant que cela puisse être de nature malveillante. Les victimes réclament de l’aide, se demandant où elles vont dormir ce soir.

L’Ecole nationale République d’Argentine ne peut fonctionner dans une atmosphère pareille. Déjà, la présence de ces déplacés nuit énormément à l’apprentissage des enfants. Certains de ces sans-abri ont souvent des comportements inacceptables durant les heures de cours, rapportent des responsables. Cette école n’est pas la seule à partager sa cour avec un camp d’hébergement. Une dizaine d’autres  de Port-au-Prince, de Delmas et de Pétion-Ville, deux ans après le séisme de janvier 2010, cohabitent encore avec des déplacés. 

Une soirée en l’honneur des invités d’Etonnants voyageurs

La résidence privée de l’ambassadeur de France en Haïti, Didier Le Bret, a accueilli ce jeudi 2 février 2012 une manifestation culturelle. Un cocktail organisé en l’honneur des invités de la 3e édition du festival Etonnants voyageurs, notamment les artistes et écrivains qui arrivent de l’étranger.

L’objectif de ce cocktail culturel organisé chez l’ambassadeur Didier Le Bret est de réunir les invités du festival « Etonnants voyageurs », lequel se déroule  du 1er au 4 février. Cette soirée a été un moment de grandes retrouvailles entre écrivains, acteurs culturels, artistes et amis de la littérature.

20 heures, la plupart des invités sont déjà arrivés. Contents de se voir les uns les autres, ils se donnent l’accolade. Le député Gracia Delva, le Premier ministre Garry Conille, ainsi que le ministre de la Culture, Pierre-Raymond Dumas représentent les autorités haïtiennes à cette soirée.

L’agréable odeur des bons petits plats ornant les tables de chez l’ambassadeur, le tintement des verres et la douce musique, jouée en arrière-plan, rehaussent l’éclat de la soirée. Les plus vieux se sont regroupés au bord de la piscine pour échanger entre eux sur la vieille littérature et leur vieille amitié, devant leurs verres de Whisky posés sur des petites tables.

Les plats valent la peine d’être dégustés, même si l’on n’a pas faim, et les verres de toutes les boissons sont tentants. Que ceux qui vont prendre le volant évitent de se soûler ! Amélie Baron, la correspondante de RFI en Haïti, qui a ôté son costume de journaliste ce soir-là, pour s’offrir une soirée de plaisir, s’est vêtue d’une courte robe décontractée verte teintée de noir.

Les écrivains haïtiens Dany Laferrière, Kettly Mars, Lionel Trouillot, Yanick Lahens, Franketienne  et Emmelie Prophète se réjouissent de cette belle et riche soirée.

Pour Dany, il ne manque à cette soirée que la présence des lecteurs de moins de 17 ans, puisque l’un des objectifs était de permettre aux lecteurs de rencontrer les écrivains. « C’est un festival ouvert sur le monde avec des écrivains venant du monde entier, et discutant sur des thèmes ouverts; ils ont exploré tout le pays », a souligné Dany Laferrière, qui croit que, symboliquement, il y a un lien excessivement fort entre les écrivains haïtiens et le reste de la société haïtienne. Il estime que le lecteur est l’égal de l’écrivain. « Comme il n’y a pas de cuisine sans gourmet et gourmand, il n’y a pas de littérature sans lecteur et écrivain », dit-il.

Emmelie Prophète, présente à cette soirée à la fois comme écrivaine et directrice exécutive du festival, parle déjà de la réussite de cet évènement qui n’a pas encore pris fin. « Le public a participé en grand nombre aux différentes manifestations réalisées dans 9 villes du pays » dans le cadre de ce festival organisé pour permettre au peuple haïtien d’offrir ce qu’il a.

« Malgré les menaces et accidents, nous existons et avons de belles choses à offrir », affirme Mme prophète, qui remercie les écrivains venus de partout. « Pour une fois, nous ne demandons pas, mais offrons des choses », insiste-t-elle, fière des écrivains haïtiens qui, en 2010, ont donné autre chose à voir d’Haïti que sa seule détresse, dans la presse internationale.

 L’ambassadeur Le Bret a pris la parole pour dire qu’Haïti et la France semblent connaître, à intervalles réguliers, les mêmes maux : le doute, et parfois l’effondrement. Selon lui, les artistes et créateurs sont généralement annonciateurs et pionniers des grands changements.

« Aujourd’hui, il n’y a pas que des connaisseurs et des fervents pour apprécier la culture haïtienne. Grâce aux talents de votre pays, il y a également des milliers de regards disposés aujourd’hui à connaître et à aimer Haïti », dit-il, adressant ses remerciements aux artistes, plasticiens et écrivains présents, spécialement à ceux venus de France ou de plus loin encore.

Il a aussi mis l’accent sur la restauration prochaine d’une salle de cinéma, « l’Eldorado », lieu chargé d’histoires. Le séisme et les soubresauts politiques de ces 25 dernières années auront eu, selon lui, raison de l’une des dernières salles de cinéma de la capitale. « Je lance ici un appel à tous, aux journalistes notamment, pour nous aider à mobiliser les fonds nécessaires en France et en Haïti pour redonner un espace à ce qui fut jadis une passion haïtienne, le cinéma ». 

Le Brésil et Haïti filent le parfait amour

La présidente du Brésil, Dilma Rousseff, est arrivée en Haïti ce mercredi pour une visite de quelques heures dans le cadre d’une tournée qu’elle effectue dans les Caraïbes. La coopération entre les deux pays, la Minustah et les récents problèmes migratoires sont au menu des entretiens qu’elle a eus avec le président Michel Martelly et d’autres autorités haïtiennes.

Mercredi 1er février 2012. 9h 54 a.m., l’avion « Força area Brasilia » aux couleurs du drapeau brésilien atterrit sur la piste de l’aéroport Toussaint Louverture. Vêtue d’une veste saumon et d’un pantalon noir, la présidente du Brésil est accueillie, dès sa descente d’avion, par le président Michel Martelly et son épouse Sophia Martelly, ainsi que le Premier ministre Garry Conille. Une foule d’invités fourmille sur la piste, aux alentours du salon diplomatique de l’aéroport. Parmi  eux, un grand nombre de Brésiliens, dont des journalistes, des soldats de la Minustah et d’autres officiels.

Debout aux côtés du couple présidentiel haïtien, Mme Rousseff écoute d’abord  l’exécution de l’hymne national par la fanfare de l’USGPN  pour ensuite se laisser conduire  près du salon diplomatique orné de drapeaux des deux pays et de pancartes de bienvenue. Là, elle salue les officiels haïtiens et brésiliens, avant de débuter un entretien privé avec le président de la République devant le salon diplomatique. Enfin, les membres des deux délégations se dirigent vers leurs voitures respectives en direction du palais national.

Tout autour de l’aéroport, on peut remarquer des panneaux et affiches souhaitant la bienvenue à Mme Rousseff. Une voie, libérée par des agents de la PNH et des soldats brésiliens mobilisés dès la veille dans les rues de Port-au-Prince, mène au palais national. Des curieux se sont assemblés aux bords de la route pour assister au défilé des deux délégations qui ont emprunté la route de l’aéroport, l’avenue Martin Luther King (Nazon) et l’avenue John Brown (Lalue) pour aboutir au siège du président Martelly, palais national. Au Champ de Mars, des sinistrés se hâtent de sortir des tentes pour venir voir le défilé.

10 h 40 a.m., Palais national. La fanfare défile sur la pelouse pendant que les différents invités arrivent peu à peu. Au cours d’une conférence de presse conjointe donnée au palais national, le chef de l’Etat haïtien a adressé ses remerciements au gouvernement brésilien pour son support durant les diverses crises qu’a connues le pays au cours des 10 dernières années, particulièrement lors du séisme et de l’épidémie de choléra. Les deux présidents ont eu des discussions en privé sur la migration, l’éducation, l’énergie et la coopération tripartite Cuba-Brésil-Haïti.

Le président Martelly sollicite l’appui du Brésil pour la réalisation de plusieurs projets courants, notamment le programme national de lutte contre la faim baptisé « Aba grangou », l’unité de construction de logement, « un projet de construction massive de logements sociaux ». Le Brésil va aussi apporter sa contribution dans le domaine des sports par la coopération technique en formation et en équipements. Il financera les  travaux de construction de la centrale hydroélectrique (Artibonite 4C), entrepris par le président René Préval, qui nécessitent une somme de 192 millions de dollars, selon le président de la République d’Haïti.

Le chef de l’Etat haïtien a en outre réitéré sa volonté de reconstituer l’armée haïtienne, ce qui favorisera le départ de la Minustah. « Une commission mixte sera créée pour travailler sur la faisabilité de ce projet », a-t-il annoncé. La migration des Haïtiens au Brésil est aussi abordée entre les deux chefs d’Etat. « 1 200 visas seront octroyés aux Haïtiens sur une durée allant jusqu’à 5 ans », a fait savoir le président Martelly. Il invite les compagnies brésiliennes  à venir s’installer en Haïti, tout en souhaitant que ces entreprises bénéficient de prêts  des banques internationales.

La présidente Dilma Rousseff affirme avoir beaucoup d’intérêt dans les propositions du président Martelly, le félicitant pour  « la démocratie haïtienne » et sa capacité de former un nouveau gouvernement garantissant la participation du Brésil dans la reconstruction d’Haïti. La présidente du Brésil promet de donner son support aux secteurs de la santé et de la sécurité. Elle s’engage aussi à soutenir le programme d’évacuation dans les camps. Le processus de la réduction des soldats brésiliens de la Minustah en Haïti doit être enclenché sous peu, selon Mme Rousseff, qui vote pour la réduction systématique de la troupe à long terme et la formation d’une commission mixte de sécurité.

Le Brésil est prêt à recevoir les Haïtiens à la recherche d’opportunités, promet la présidente Rousseff, certaine que le Brésil et Haïti auront toujours de bons rapports. Elle souhaite garantir aux Haïtiens l’accès au Brésil « dans des conditions de sécurité et de dignité, tout en combattant le trafic humain ».

Le Brésil, on le sait, dirige, depuis 2004, la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah). C’est le pays qui a fourni le plus gros contingent à cette troupe. Mme Rousseff, qui a effectué une visite de 48 heures à Cuba, s’est rendu en Haïti  pour la première fois depuis son élection comme présidente du Brésil. Avant de quitter Haïti en fin de journée, Dilma Rousseff devait rendre visite aux Casques bleus brésiliens.