Quel avenir pour l’assainissement par la collecte des déchets plastiques ?

Depuis quelque temps, des hommes et des femmes en quête du pain quotidien se sont lancés dans la collecte des matières plastiques et métalliques destinées à être recyclées. Une initiative de l’Organisation moderne pour la formation d’une population victime (OMFPV), dans l’objectif de lutter contre la pollution de l’environnement et de réduire les risques de maladies dues aux milieux malsains.

C’est à titre de volontaire, que ces citoyens pour la plupart mères et pères de famille, s’étaient livrés à cette activité qui vise non seulement à nettoyer Port-au-Prince, mais aussi à permettre aux plus vulnérables de faire face aux défis scolaires de cette année. Cependant trois mois après, un conflit semble avoir éclaté entre les participants qui réclament une allocation digne et les responsables de l’organisation qui nient avoir promis un salaire à ces gens.

Une manifestation de protestations a eu lieu à Siloe la semaine dernière. Ces manifestants venaient de refuser la somme de soixante gourdes pour leur travail. Visiblement révoltés, ils ont affirmé avoir non seulement collecté des matières plastiques mais aussi nettoyé leur quartier tous les jours et ce, durant trois mois et demi, dans l’espoir de se faire une petite somme d’argent. On les a retrouvés dans des endroits les plus surprenants,par exemple au Portail Léogâne bravant les eaux putrides et nauséabondes.

Pour eux, ce geste de gratification de la part du président de l’OMFPV, est une insulte à leur égard. « D’ailleurs, certains d’entre nous payent plus que ça comme frais de transport », a indiqué une dame, soulignant qu’elle vient chaque jour de Pernier. « De plus, des réunions sont organisées de temps en temps à Pétion-Ville; pour y aller, on paie quand même le transport ! », s’est-elle exclamée expliquant qu’elle a laissé toutes ses activités pour se livrer entièrement à celle-là qui paraissait très prometteuse.

Aucun de ces protestataires n’a caché son mécontentement vis-à-vis du président de l’OMFPV, Jean Hérold Bélidor, qui selon eux, a abusé de leur bonne foi. Ils sont 1.640 personnes dans la zone de Siloé à se livrer à cette activité qui s’étend dans les communes de Pétion-Ville, de Port-au-Prince, de Delmas, de Croix-des-Bouquets, de Thomazeau et de Martissant, selon un chef d’équipe. L’initiative devrait s’étendre à d’autres communes de la région métropolitaine de Port-au-Prince et des villes de province, selon les responsables qui ont affirmé avoir établi un pacte avec une usine de recyclage, ECSA, sise sur la route de l’aéroport qui les récupère au prix de trois gourdes la livre, ce qui équivaut à environ 23 pots.

Pour s’inscrire à cette activité, il a fallu verser la somme de 110 gourdes – 310 gourdes pour les chefs d’équipe – selon ce qu’a rapporté un chef d’équipe. Des équipes de 20 personnes ont été éparpillées un peu partout en vue de collecter ces déchets entreposés ensuite temporairement au local du Lycée de Pétion-Ville afin d’effectuer le tri.

Cette initiative jugée louable par plus d’un n’aurait aucune source de financement, à en croire les propos du président de l’organisation qui a nié avoir promis aux « volontaires » de les rétribuer un salaire. « Ces individus ont consenti à travailler volontairement durant une période de temps indéterminée, en attendant que le projet soit officiellement mis en branle », a-t-il indiqué, précisant que l’organisation est actuellement en quête de financement l’État et des ONG. « Pour le moment, la seule source de financement de ce programme est la vente de ces déchets à une compagnie », a-t-il ajouté.

Les moyens financiers font énormément défaut à l’organisation qui existe depuis 1990, selon M. Bélidor, qui en appelle à l’aide de tout un chacun, particulièrement les autorités établies afin de poursuivre cette démarche qui vise à la propreté de nos centres urbains.

En ce qui concerne la protestation des ouvriers, M. Bélidor a accusé Mme Carmène Céant, la responsable de la zone de Siloé, à qui il a livré la somme de 100.000 gourdes pour gratifier ses ouvriers, d’être l’instigatrice de ce mouvement. Selon lui, ce conflit est dû à un manque de sensibilisation de la part des responsables de zone, qui devraient expliquer à la population qu’il s’agit d’un volontariat. « Nous avons gratifié toutes les zones, et tout le monde est satisfait, il n’y a que la zone de Siloé à avoir protesté », a-t-il ajouté.

Pour Mme Céant, 100.000 gourdes destinées à être distribuées à 1 640 personnes, est un geste révoltant. Elle a affirmé ne pas disposer d’assez d’audace pour faire face à ces gens qui s’attendaient à beaucoup plus. « Même si l’on parle de volontariat, tout le monde sait que tout mouvement volontaire dispose des frais dignes pour gratifier les volontaires; les gens payent le transport, ils salissent leurs vêtements », a-t-elle fait remarquer.

Se trouvant sous les menaces d’une population en colère, elle a dû demander à M. Bélidor de trouver un terrain d’entente. Toujours selon Mme Céant, présentant un papier qui porte la signature de M. Bélidor, ils sont parvenus ensemble à l’accord de verser mille gourdes par personne en plusieurs versements. Cependant M. Bélidor a dénoncé un acte de kidnapping réalisé sur sa personne, par ces manifestants que Mme Céant dirigeait. « On m’a forcé à signer ce pacte de gratification », a-t-il rétorqué, soutenant qu’il ne versera rien de plus à ces gens.

Entre-temps, d’autres citoyens rencontrés à Caradeux ont affirmé n’avoir reçu aucune allocation. Ils ont précisé que toutes les zones sont en révolte contre l’organisation. « M. Bélidor a bel et bien promis de nous payer, lors d’une réunion organisée le 18 Juillet dernier; il avait affirmé que la période de volontariat est passée et que maintenant, nous allons recevoir de l’argent afin d’envoyer nos enfants à l’école, ayant établi un partenariat avec l’USAID », a indiqué une dame, chef d’équipe au niveau de Caradeux.

« Il a réalisé un marathon au lycée national de Pétion-Ville du 17 juillet au 14 aout 2011 », a-t-elle poursuivi, accusant le président de la République qui, selon elle est bien au courant de leur existence et de l’importance du travail qu’ils font. « D’ailleurs, nous avons balayé les environs du palais national, lorsque le président est rentré de Chili, et puis sur nos matériels, il est inscrit : « mouvman tèt kale »», a-t-elle ajouté.

Pour soulager leur frustration, plusieurs d’entre eux iront directement vendre leurs plastiques à la compagnie, ont-ils expliqué.

A Juvénat, des bouteilles plastiques sont éparpillées au bord de la route. Un résident de la zone a expliqué que des ouvriers non gratifiés et découragés les ont abandonnés là depuis des semaines. Il a ajouté que l’activité est actuellement interrompue dans ce quartier. Une femme âgée rencontrée sur les lieux paraissait un peu plus confiante : elle a continué de collecter ces déchets pour les apporter à Christ-Roi. « On m’avait donné une allocation de 350 gourdes pour mes deux mois et demi de travail, avec ça, J’ai pu m’acheter une paire de chaussures pour travailler », a-t-elle ironisé, ajoutant qu’ils attendent l’établissement du nouveau gouvernement pour travailler officiellement.

L’initiative commençait pourtant à porter ses fruits dans la capitale car les déchets plastiques étaient de moins en moins visibles à travers les rues. Néanmoins, ces déchets empilés sous forme d’immondices et d’alluvions représentent la principale source d’insalubrité des agglomérations et contribuent à enlaidir davantage la capitale.

Gérer le transport maritime en Haïti, un casse-tête pour le SEMANAH

Le non-respect des normes par les usagers des voies maritimes est le principal inconvénient que rencontre, dans l’exécution de son travail, le Service de navigation et de transport maritime en Haïti (Semanah), dont la mission est de réguler et de contrôler les eaux maritimes haïtiennes, qu’elles soient côtières, régulières ou internationales.

Un représentant de l’institution placé dans chaque port et chaque point de mouillage, de concert avec quelques représentants des gardes-côtes, effectue un travail de vérification des bateaux et voiliers qui doivent prendre les eaux. Il ne doit pas y avoir de surcharge, l’embarcation doit disposer de matériel de premier soin, de gilet de sauvetage, etc. Le capitaine doit s’informer sur le temps qu’il fera lors de son voyage et ne pas partir en cas d’interdiction de l’institution qui, dès qu’il y a une menace sur les eaux, avise toutes les institutions partenaires et les capitaines. Si tout se passe bien, le capitaine pourra avoir accès à un certificat de déplacement. Cependant, les choses ne se passent pas toujours comme ça; les deux naufrages survenus récemment peuvent en témoigner.

En effet, le 26 juillet 2011 dernier, une petite chaloupe à moteur qui sortait de Borgne pour se rendre à Anse-à-Foleur, a sombré au large d’Anse-à-Foleur coûtant la vie à plus de dix personnes. Seulement 19 survivants ont été dénombrés, selon une lettre du représentant territorial du SEMANAH au Cap-Haïtien, M. Bernadin Francisque, adressée au directeur de la sécurité maritime, M.Ronald Jabouin au surlendemain de l’incident. « Nous n’avions pas eu la chance de rencontrer le capitaine de cette chaloupe qui pourrait nous informer sur la quantité de personnes qui étaient à bord; mais selon des sources peu sûres, il devait y avoir au moins 40 personnes, le vent était un peu fort », a indiqué M. Bernadin Francisque.

Pour la directrice générale du SEMANAH, Mme Marie Yvrose Jean, il s’agissait d’un bateau surchargé pris par un mauvais vent, à 45 minutes d’Anse-a-Foleur, c’était un navire pirate (non identifié) dont le capitaine était quand même enregistré aux archives de l’institution. Celui-là avait décidé de prendre les eaux, alors qu’on le lui avait interdit ce jour-là, prenant départ à un point non reconnu par les autorités maritimes.

« Ce cas est très courant: pour éviter de suivre les procédures, certains capitaines préfèrent ne pas démarrer leur navire dans les points d’embarcation autorisés. », a révélé le numéro un du Semanah, qui ne compte que 15 bureaux territoriaux; « On ne peut pas faire de chaque point de déplacement un port ou un point de mouillage, ce serait placer des représentants sur tous les côtes du pays, ce qui est impossible », a-t-elle ajouté.

L’assistant-directeur de la sécurité maritime, M. Dieudonné Bruno, dans une lettre adressée au directeur général, a indiqué que le canot qui faisait entre 7 et 8 mètres de long pouvait transporter 15 personnes s’il avait le matériel de sauvetage. Les conditions météorologiques n’étaient pas trop favorables car le vent soufflait jusqu’à 20 noeuds et les vagues montaient à six pieds de haut. Le canot aurait subi une double vague et un fort vent de travers occasionnant une gîte sous le poids du déplacement des passagers à tribord. « Le représentant territorial du Cap-Haïtien a rencontré le juge de paix de Borgne, Me Saint-Louis, lui sollicitant l’arrestation de M. Luc Augustin, propriétaire et capitaine du navire, mais celui-ci a pris la fuite », a-t-il écrit.

Durant le passage du cyclone Emily sur le pays, le Semanah avait interdit toute navigation maritime, mais cela n’a pas empêché que certains incrédules aient quand même tenté de prendre les eaux. « On a procédé ce matin à l’arrestation d’un capitaine », a fait savoir le directeur général, le vendredi 5 août dernier, date à laquelle l’interdiction n’était pas encore levée pour la navigation, en dépit du fait que le ministre de l’Intérieur et des Collectivités territoriales, Paul Antoine Bien-aimé, ait annoncé la levée de l’alerte sur tout le territoire. « Jusqu’à ce moment, la mer est encore agitée », a affirmé Mme Yvrose Jean vendredi.

En ce qui a trait au naufrage du navire la Belle Gonavienne # 2, survenu le 27 juin 2011, à Anse-à-Galet, le représentant territorial du Semanah à Anse-à-Galet, Vilbrun Vilméus, a affirmé que celui-là est renversé par un gros vent non loin de son port. Le navire avait à son bord 19 passagers et quatre membres d’équipage pour un total de 23 personnes, a-t-il confirmé. « On a retrouvé cinq morts, toutes sont des femmes, sept survivants et sept personnes sont portées disparues », a fait savoir l’Armateur, M. Elie Guipson, ajoutant que le navire avait également à son bord 227 sacs de charbon, 8 sacs de d’arachides et quelques volailles. Ce navire-là était enregistré, a appuyé le directeur général.

Mme Yvrose Jean félicite certains notables de cette zone qui ont demandé au bureau central du Semanah d’organiser des séances de formation pour les capitaines de la Gonâve, afin qu’ils comprennent comment protéger la vie des passagers en mer, pour éviter ce genre d’accidents. Elle affirme qu’à plusieurs reprises, ils ont organisé des séminaires à leur intention. « D’ailleurs des inspecteurs sont actuellement en formation », a-t-elle révélé.

Le directeur général du Semanah a souligné que l’institution qu’elle dirige est confrontée à un problème majeur qui est le vol du matériel de signalisation qui se fait de plus en plus. Il évoque aussi les ports qui ne sont pas en bon état.

Dans sa sphère d’action, le Semanah travaille en collaboration avec la police et les élus locaux (député, CASEC, ASEC). Il se trouve paralysé par l’absence de législation maritime. Les nombreux traités internationaux auxquels la République d’Haïti a adhéré, particulièrement les conventions de l’OMI, ne sont pas insérés dans notre droit positif, a expliqué Mme Yvrose Jean, qui rêve d’un gouvernement plus ferme qui pourra faire respecter les normes. « Les gens ne respectent pas la loi ni l’Etat », s’est-elle plaint, souhaitant que les ports de cabotage soient aménagés pour faciliter les contrôles.

« Presque toutes les activités relatives aux mouvements des navires dans les eaux haïtiennes et également dans les ports de la région sont réunies par la direction de la Sécurité maritime. Cette Direction englobe aussi la réglementation du transport dans les eaux haïtiennes, l’enregistrement et le travail des gens de mer nécessaires à la bonne conduite du navire et de la signalisation maritime: trois éléments vitaux pour la sécurité de la navigation maritime. Elle représente l’une des plus importantes directions du SEMANAH qui comprend quatre autre directions : l’unité de coordination, la direction de la sécurité maritime, la direction de la coopération et des affaires maritimes et la direction de la protection du milieu marin », a expliqué Mme Yvrose Jean.