L’assurance santé face à la réalité haïtienne

L’accès aux soins de santé en Haïti n’est pas à la portée de tout le monde, à cause de la grande disparité des revenus, pis encore, à cause du taux de chômage élevé dans le pays.  L’assurance santé ne protège qu’une faible partie de la population (moins de 10%). L’Etat ne prend en charge que ses fonctionnaires.

Dans de nombreux pays, l’assurance maladie est une composante fondamentale de la sécurité sociale; pourtant la réalité d’Haïti démontre toute autre chose.L’État n’octroie pas les ressources financières suffisantes pour répondre à la demande sans cesse croissante de la population et n’arrive jamais à faire valoir le droit à la santé de ceux qui sont les plus vulnérables.

De son côté, la majorité de la population ignore ce droit fondamental que leur garantit la Déclaration universelle des droits de l’homme. Même ceux qui bénéficient d’une assurance ne seraient pas bien imbus de ce qu’est en réalité une assurance, à en croire certains responsables de compagnies d’assurance.

D’une part, il y a le problème des assurances qui se pose et, d’autre part, il y a celui des hôpitaux, qui est encore plus grave.

Certains croient qu’avoir une assurance devrait leur permettre de se rendre à l’hôpital sans avoir de soucis financiers. Un assuré qui devait être hospitalisé d’urgence à l’hôpital du Canapé-Vert a été choqué d’entendre qu’il lui fallait verser environ 25 000 gourdes pour y être admis, alors qu’il dispose d’une assurance. « A quoi me sert une assurance alors, si je dois payer tout cet argent ? », s’est-il demandé. « Cette somme constitue un dépôt exigible, explique une employée de l’administration de l’hôpital, dans lequel on facturera ce que l’assurance ne couvre pas, pour les frais de chambre, d’analyses, de médicaments et d’autres services qui n’entrent pas dans le cadre de l’assurance ».

Selon cette employée, le dépôt varie entre 11 000 et 25 000 gourdes par rapport à la chambre choisie (la moins chère est de 1900 gourdes par jour) et par rapport à la cause de l’hospitalisation (il peut s’agir d’une opération chirurgicale ou pas). Une remise sera effectuée après que la maison d’assurance aura payé.

Finalement, avoir une assurance ne permet peut-être pas de faire face aux urgences et aux pannes financières, comme le croit plus d’un. En fait, chaque hôpital a ses démarches particulières vis-à-vis des assurances. A l’Hôpital français, la somme exigée à l’entrée est beaucoup moindre, entre 2 500 gourdes et deux fois plus, selon le cas. Mais dans les deux cas, pour être admis à l’hôpital, une lettre de l’assureur est indispensable. L’hôpital Saint-Joseph, par contre, emploie une autre stratégie: la facture peut être réglée après.

Chaque assurance propose des remboursements différents sur les frais de santé qui varient selon le type de contrat et selon le ou les bénéficiaires. Mais, de toute façon, pour avoir une assurance, il faut déjà avoir de l’argent; d’ailleurs aucune compagnie d’assurance ne couvre les chômeurs. En fonction du contrat auquel on a souscrit, l’assurance santé peut tout rembourser ou seulement une partie des frais. Cela dépend du montant de la cotisation de l’assuré: plus sa prime d’assurance est élevée, mieux il sera remboursé. Parfois, certains médicaments ou prestations ne sont pas pris en charge.

Afin de ne pas le découvrir au plus mauvais moment, il faudrait donc toujours bien se renseigner sur les remboursements de sa mutuelle, peut-on comprendre à partir des informations fournies par les responsables de compagnies d’assurance. Cela permettra de choisir son assurance santé en fonction de ses besoins et de ses possibilités.

En gros, il n’existe pas de règle de base en ce qui concerne la relation entre les hôpitaux et les compagnies d’assurance. Chaque entité agit selon les règlements internes de son institution.

Au niveau de la Nationale d’assurance S.A. (NASSA), il existe par exemple deux plans d’assurance, explique le responsable de cette institution, M. Raoul Mérové Pierre :

Pour la plupart des gens de niveau financier moyen qui préfèrent parfois garder leur médecin habituel, ils doivent faire choix du « Plan d’assurance conventionnel », qui donne le libre choix. Par contre, cela va dépendre largement de la politique de l’hôpital qui souvent, ne voulant pas avoir de problème avec l’assureur, exige un dépôt. « L’hôpital du Canapé-Vert, par exemple, est le plus strict sur ce point », souligne le responsable d’une compagnie d’assurance, indiquant que les hôpitaux ne connaissent pas les barèmes des bénéficiaires, qui sont établis généralement par les chefs d’entreprises en fonction de leur budget, du nombre et du profil des employés qu’ils ont. Les règles du jeu sont définies suivant les barèmes choisis par l’employeur. « Si l’employé veut dépasser ce que son entreprise lui offre, c’est normal qu’il paie le surplus », ajoute-t-il.

Le deuxième plan qui concerne surtout les petites bourses, contrairement au premier, est très limité. Pour ce « Plan d’assurance avec réseau », il y a eu une entente préalable avec des pourvoyeurs médicaux qui sont en majorité des petits hôpitaux de la place, comme les DASH, l’hôpital de la communauté haïtienne, etc. Dans ce cas-là, la couverture est plus ou moins totale, sinon qu’il faut payer de petits frais de dossiers.

L’Etat ne dispose que d’un programme d’assurance unique, qui est exclusivement pour les agents de la fonction publique. Géré par le Groupe Santé plus (GSP), ce programme d’auto-assurance couvre 74 961 personnes, dont 60 614 fonctionnaires et leurs dépendants éligibles, 13 367 pensionnés et 980 contractuels, soit au total une population bénéficiaire de plus de 300 000 personnes, selon Jean Euler Auguste, vice-président de conseil d’administration de GPS, et Aristobule Deverson, membre du conseil.

Les deux responsables indiquent que le GSP a pris en charge la gestion du programme aux termes d’un contrat signé le 1er août 2000 avec l’Etat haïtien représenté par le ministère de l’Economie et des Finances. Au sujet de cette entente, font-ils savoir, il a été décidé deux options pour l’utilisation de l’assurance :

La couverture traditionnelle qui, selon leurs explications, est comme pour le premier plan de la NASSA mentionné plus haut, et la prise en charge complète qui, comme pour le second plan de la Nassa, se fait à travers la mise en place des réseaux coordonnés de délivrance de soins composés de prestataires des soins individuels, d’Unités périphériques (UP) et d’hôpitaux. L’assuré et ses dépendants en bénéficient moyennant le paiement de 50 gourdes et de 20% du coût des médicaments.

Cependant, seulement 14 structures de soins dénommées Unités périphériques (UP) partenaires du GSP existent dans la région métropolitaine de Port-au-Prince et 4 dans les plus grandes villes de province, pour dispenser des soins en Haïti, révèlent les deux responsables de GSP. Quatre autres sont disponibles pour les soins à l’étranger.

On rapporte cependant que certains UP abusent des patients en réclamant plus: « Dans ce cas, les clients doivent savoir qu’il leur faut porter plainte; il y a un service de doléances au niveau du bureau de la compagnie qui gère ce genre de choses. Des sanctions sont envisagées dans ces cas », affirme M. Auguste, faisant remarquer qu’il y a un grave déficit d’informations au niveau de la population.

L’Etat et les chefs de groupe sont responsables de ce déficit d’information, selon M. Auguste, qui assure avoir organisé des séances de formation pour les responsables de groupe. Ceux-là devraient à leur tour informer la population, car il n’existe pratiquement pas de lien direct entre l’assuré et la compagnie. Sauf pour quelques cas particuliers, toutes les négociations sont faites entre la compagnie et les responsables d’entreprises.

Face à de telles contraintes, un système d’assurance maladie aurait pu grandement contribuer à la distribution des soins de santé en facilitant l’accès aux classes moyennes et surtout aux classes défavorisées. Mais faut-il commencer par les assurances proprement dites ou par les hôpitaux ?

Plus d’un croit que le pays n’est pas encore prêt pour les assurances, parce qu’il y a une énorme carence en hôpitaux publics ou hôpitaux tout court, surtout à la campagne. Les assurances santé ne peuvent pas marcher sans hôpitaux, d’après certains. Les responsables de compagnie d’assurance croient de leur côté que mieux vaut peu que rien. En attendant que le système d’assurance soit beaucoup plus élargi à l’avenir, ils se contentent de servir la faible partie de la population qui y a accès.

Inondation à Port-au-Prince

Vendredi 9 septembre 2011, 3 heures p.m. Les averses qui viennent de s’abattre sur la capitale provoquent des dégâts. A Clercine 14, dans la commune de Tabarre, une ligne interminable de voitures est formée, résultat des coulées de boue qui s’élargissent au fur et à mesure dans le carrefour, atteignant les genoux des passants.

Ces gens n’ont pas le choix; s’ils veulent se rendre à l’autre bout de la route, ils doivent impérativement mettre les pieds dans la boue.

Des policiers sont là pour essayer de régler la circulation, mais les moteurs de certaines voitures s’éteignent au beau milieu de l’eau, une scène qui amuse plusieurs dizaines d’individus qui se sont assemblés aux alentours pour observer et faire le décompte des voitures qui trépassent, tuée par la furie des eaux.

Entre-temps, les passagers des tap-tap en descendent pour continuer la route à pied.

Des citoyens de la zone expliquent que les eaux inondent la zone après seulement quelques minutes de pluie. Aucune victime n’a encore été signalée. Cependant, ces citoyens demeurent très incertains par rapport à la proportion que les dégâts peuvent prendre si les averses continuent de frapper la capitale dans les jours qui viennent.

D’autres scènes similaires sont remarquées un peu partout dans la zone métropolitaine. Des tas d’immondices sont éparpillés à travers les rues, rendant la circulation très difficile. Il est rapporté qu’un pont a été emporté à Bois-Moquette, et que les eaux en furie ont tout emporté sur leur chemin.

Quel avenir pour l’assainissement par la collecte des déchets plastiques ?

Depuis quelque temps, des hommes et des femmes en quête du pain quotidien se sont lancés dans la collecte des matières plastiques et métalliques destinées à être recyclées. Une initiative de l’Organisation moderne pour la formation d’une population victime (OMFPV), dans l’objectif de lutter contre la pollution de l’environnement et de réduire les risques de maladies dues aux milieux malsains.

C’est à titre de volontaire, que ces citoyens pour la plupart mères et pères de famille, s’étaient livrés à cette activité qui vise non seulement à nettoyer Port-au-Prince, mais aussi à permettre aux plus vulnérables de faire face aux défis scolaires de cette année. Cependant trois mois après, un conflit semble avoir éclaté entre les participants qui réclament une allocation digne et les responsables de l’organisation qui nient avoir promis un salaire à ces gens.

Une manifestation de protestations a eu lieu à Siloe la semaine dernière. Ces manifestants venaient de refuser la somme de soixante gourdes pour leur travail. Visiblement révoltés, ils ont affirmé avoir non seulement collecté des matières plastiques mais aussi nettoyé leur quartier tous les jours et ce, durant trois mois et demi, dans l’espoir de se faire une petite somme d’argent. On les a retrouvés dans des endroits les plus surprenants,par exemple au Portail Léogâne bravant les eaux putrides et nauséabondes.

Pour eux, ce geste de gratification de la part du président de l’OMFPV, est une insulte à leur égard. « D’ailleurs, certains d’entre nous payent plus que ça comme frais de transport », a indiqué une dame, soulignant qu’elle vient chaque jour de Pernier. « De plus, des réunions sont organisées de temps en temps à Pétion-Ville; pour y aller, on paie quand même le transport ! », s’est-elle exclamée expliquant qu’elle a laissé toutes ses activités pour se livrer entièrement à celle-là qui paraissait très prometteuse.

Aucun de ces protestataires n’a caché son mécontentement vis-à-vis du président de l’OMFPV, Jean Hérold Bélidor, qui selon eux, a abusé de leur bonne foi. Ils sont 1.640 personnes dans la zone de Siloé à se livrer à cette activité qui s’étend dans les communes de Pétion-Ville, de Port-au-Prince, de Delmas, de Croix-des-Bouquets, de Thomazeau et de Martissant, selon un chef d’équipe. L’initiative devrait s’étendre à d’autres communes de la région métropolitaine de Port-au-Prince et des villes de province, selon les responsables qui ont affirmé avoir établi un pacte avec une usine de recyclage, ECSA, sise sur la route de l’aéroport qui les récupère au prix de trois gourdes la livre, ce qui équivaut à environ 23 pots.

Pour s’inscrire à cette activité, il a fallu verser la somme de 110 gourdes – 310 gourdes pour les chefs d’équipe – selon ce qu’a rapporté un chef d’équipe. Des équipes de 20 personnes ont été éparpillées un peu partout en vue de collecter ces déchets entreposés ensuite temporairement au local du Lycée de Pétion-Ville afin d’effectuer le tri.

Cette initiative jugée louable par plus d’un n’aurait aucune source de financement, à en croire les propos du président de l’organisation qui a nié avoir promis aux « volontaires » de les rétribuer un salaire. « Ces individus ont consenti à travailler volontairement durant une période de temps indéterminée, en attendant que le projet soit officiellement mis en branle », a-t-il indiqué, précisant que l’organisation est actuellement en quête de financement l’État et des ONG. « Pour le moment, la seule source de financement de ce programme est la vente de ces déchets à une compagnie », a-t-il ajouté.

Les moyens financiers font énormément défaut à l’organisation qui existe depuis 1990, selon M. Bélidor, qui en appelle à l’aide de tout un chacun, particulièrement les autorités établies afin de poursuivre cette démarche qui vise à la propreté de nos centres urbains.

En ce qui concerne la protestation des ouvriers, M. Bélidor a accusé Mme Carmène Céant, la responsable de la zone de Siloé, à qui il a livré la somme de 100.000 gourdes pour gratifier ses ouvriers, d’être l’instigatrice de ce mouvement. Selon lui, ce conflit est dû à un manque de sensibilisation de la part des responsables de zone, qui devraient expliquer à la population qu’il s’agit d’un volontariat. « Nous avons gratifié toutes les zones, et tout le monde est satisfait, il n’y a que la zone de Siloé à avoir protesté », a-t-il ajouté.

Pour Mme Céant, 100.000 gourdes destinées à être distribuées à 1 640 personnes, est un geste révoltant. Elle a affirmé ne pas disposer d’assez d’audace pour faire face à ces gens qui s’attendaient à beaucoup plus. « Même si l’on parle de volontariat, tout le monde sait que tout mouvement volontaire dispose des frais dignes pour gratifier les volontaires; les gens payent le transport, ils salissent leurs vêtements », a-t-elle fait remarquer.

Se trouvant sous les menaces d’une population en colère, elle a dû demander à M. Bélidor de trouver un terrain d’entente. Toujours selon Mme Céant, présentant un papier qui porte la signature de M. Bélidor, ils sont parvenus ensemble à l’accord de verser mille gourdes par personne en plusieurs versements. Cependant M. Bélidor a dénoncé un acte de kidnapping réalisé sur sa personne, par ces manifestants que Mme Céant dirigeait. « On m’a forcé à signer ce pacte de gratification », a-t-il rétorqué, soutenant qu’il ne versera rien de plus à ces gens.

Entre-temps, d’autres citoyens rencontrés à Caradeux ont affirmé n’avoir reçu aucune allocation. Ils ont précisé que toutes les zones sont en révolte contre l’organisation. « M. Bélidor a bel et bien promis de nous payer, lors d’une réunion organisée le 18 Juillet dernier; il avait affirmé que la période de volontariat est passée et que maintenant, nous allons recevoir de l’argent afin d’envoyer nos enfants à l’école, ayant établi un partenariat avec l’USAID », a indiqué une dame, chef d’équipe au niveau de Caradeux.

« Il a réalisé un marathon au lycée national de Pétion-Ville du 17 juillet au 14 aout 2011 », a-t-elle poursuivi, accusant le président de la République qui, selon elle est bien au courant de leur existence et de l’importance du travail qu’ils font. « D’ailleurs, nous avons balayé les environs du palais national, lorsque le président est rentré de Chili, et puis sur nos matériels, il est inscrit : « mouvman tèt kale »», a-t-elle ajouté.

Pour soulager leur frustration, plusieurs d’entre eux iront directement vendre leurs plastiques à la compagnie, ont-ils expliqué.

A Juvénat, des bouteilles plastiques sont éparpillées au bord de la route. Un résident de la zone a expliqué que des ouvriers non gratifiés et découragés les ont abandonnés là depuis des semaines. Il a ajouté que l’activité est actuellement interrompue dans ce quartier. Une femme âgée rencontrée sur les lieux paraissait un peu plus confiante : elle a continué de collecter ces déchets pour les apporter à Christ-Roi. « On m’avait donné une allocation de 350 gourdes pour mes deux mois et demi de travail, avec ça, J’ai pu m’acheter une paire de chaussures pour travailler », a-t-elle ironisé, ajoutant qu’ils attendent l’établissement du nouveau gouvernement pour travailler officiellement.

L’initiative commençait pourtant à porter ses fruits dans la capitale car les déchets plastiques étaient de moins en moins visibles à travers les rues. Néanmoins, ces déchets empilés sous forme d’immondices et d’alluvions représentent la principale source d’insalubrité des agglomérations et contribuent à enlaidir davantage la capitale.

Le Plateau central ou la perle dévoilée

En réalisant les 8 et 9 juillet l’édition inaugurale de sa foire intitulée, cette année, Foire-expo Mirebalais, l’Initiative de la société civile (ISC) a pu dévoiler l’énorme capacité de production des habitants du Plateau central et les possibilités d’investissement du département du Centre. Rejointe par plusieurs autres organisations, l’ISC a réussi le pari de déclarer : « Le Plateau central est désormais aux investissements.

« Le réseau électrique s’établit presque dans le Plateau central. Nous pouvons estimer à 90% la réalisation de ce projet. Le département du Centre se targue aujourd’hui d’être doté du meilleur réseau routier du pays. Et peut-on négliger les études présentant notre département comme le coin d’Haïti le plus sécuritaire en matière sismique ? » Celui qui parle répond du nom de Jean Souverne Delva, maire de Thomonde. Accompagné de Laurent-Kénold Désert, celui de Saut-d’Eau, le maire Delva vient participer à l’édition inaugurale de la foire de l’Initiative de la société civile (ISC) et du Conseil haïtien des acteurs non étatiques (CONHANE) tenue les 8 et 9 juillet et intitulée, cette année, Foire-Expo 2011 Mirebalais.

Le plus grand rêve de M. Delva, c’est de transformer, aux côtés de ses homologues du département, le Plateau central en un site d’attraction. « Il est temps que la tendance soit renversée, dit M. Delva. Car le département le plus riche en matière de réserve d’eau, d’espèces animales et végétales et de sites touristiques ne peut plus être considéré comme le plus en retard. »

Pour les deux maires, les routes qui ont été construites et frayées à l’intérieur des communes du Centre dévoilent leurs richesses restées longtemps enclavées au sein de ce département. Mais il a fallu des initiatives du genre pour vendre sa vraie image. « Depuis l’ouverture en 2009 de la route des Orangers –  reliant Saut-d’Eau et Port-au-Prince en 27 kilomètres – seulement un restaurant et un hôtel ont été construits dans la Ville-Bonheur, fait remarquer M. Désert. Les investissements peinent encore à se concrétiser. »

Saut-d’Eau, avec ses nombreux sites d’attraction, s’apprête à accueillir ce week-end ses milliers d’hôtes de la Mont-Carmel. Palme, Saint-Jean, La Sainte-Famille et Saut-d’Eau, – la fameuse cascade à laquelle toute la commune doit son nom,- restent, à l’instar des sites dont regorgent des communes du département comme Savanette, Boucan Carré, Maïssade, Cerca-La source, Belladère et Las Cahobas, entre autres, en attente d’être exploitées.

Cinq communes frontalières, 129 rivières, 5 550 ha irrigués

« La capacité de production fruitière saute aux yeux, une trentaine de sites d’attraction dont des points d’eau et des fortifications nous attendent, martèle Joanas Gué, ministre de l’Agriculture, des Ressources naturelles et du Développement rural, qui cite le Centre comme le département d’Haïti ayant la plus faible densité de la population.

La canne à sucre, les mangues, les céréales, l’élevage, les tubercules, l’arachide, le giraumon… produits par le Centre, retiennent toujours l’attention. Pour le ministre Gué, qui tient un complexe hôtelier dans la région, l’agriculture et les services constituent deux axes à gros rendement dans le département.

Une foire d’exploration et de vente

Si l’objectif de cette foire organisée par l’ISC et le CONHANE, en collaboration avec le comité interministériel d’aménagement du territoire (CIAT) et la Chambre de commerce et d’Industrie d’Haïti (CCIH), était de montrer le potentiel économique du département du Centre et d’y attirer les investissements, la production locale était tout aussi en vedette.

Environ 65 exposants venant des quatre coins du Plateau central se sont présentés sur la place publique  de Mirebalais attendant la visite des participants. Selon plusieurs d’entre eux, leur principal objectif est de faire connaître au grand public des produits locaux jusqu’alors inconnus au niveau de la population haïtienne. En dépit de  la grande publicité effectuée à Port-au-Prince autour de cette foire, la grande foule n’a pas été au rendez-vous dès vendredi.

De la patience…

Les représentants des diverses organisations partenaires à cette initiative ont tous brillé par leurs connaissances de cette région, qui, selon eux, s’ouvre aux investissements. L’Ecole fondamentale d’application, Centre d’appui pédagogique (EFACAP) de Mirebalais et l’Hôtel La Forteresse peuvent en témoigner. Ils ont procédé à la présentation de leur travail effectué au niveau du Plateau central à l’aide de documents mis à la disposition des participants. Une méthode moderne de promouvoir une vision moderne de l’aménagement du territoire de la région, suivant une vision mise au point par la CIAT dans une étude intitulée : La boucle Centre – Artibonite. Ils ont également présenté leur projet pour ce département.

« Même si nos produits ne sont pas écoulés aujourd’hui, l’initiative est encourageante, car nous gagnerons de la publicité dont ils sont l’objet », s’est félicité Mme Michel-Ange. Accompagnée de son fils, cette exposante frisant la quarantaine, travaille dans une compagnie de transformation de fruit en vin. Sur sa table garnie de bouteilles de vin et de liqueur à base de fruits locaux, on peut également acheter de la mi-orange, une liqueur faite d’orange et de miel, des crémas et d’autres produits du même genre.

Roger, un autre artisan qui expose des produits à base de Latanier,- chapeau, valise et petite boite,- s’attend plutôt à ce que tous ses produits soient vendus et qu’il retourne à Belladère, son patelin, pour en chercher d’autres. Roger vient, quant à lui, avec le produit vedette de cette foire. « Les briquettes de charbon préparées à base de carton et de détritus sont destinées à remplacer le charbon de bois, dans le cadre de la lutte contre le déboisement », explique l’artisan. « Ça peut bien aider à réduire les déchets solides dans nos rues », dit-il.

Plusieurs autres ateliers sont également sur place, exposant des produits agricoles et d’élevage, des tableaux, bracelets, sandales, valises, nappes traditionnelles. Sur plusieurs tables figuraient du café, des mangues, du sham sham, de la farine de manioc,  des bananes, de l’amidon, pour ne citer que ces produits.

Financée en grande partie par la délégation de l’Union européenne, cette activité a coûté environ 65 milles euros, selon Alexandre Polack, Porte- parole de la délégation de l’Union européenne en Haïti. La Banque mondiale, la Coopération espagnole, le Fonds d’assistance économique et sociale (FAES), le Programme alimentaire mondial (PAM), l’USAID- Winner et la World vision ont également contribué financièrement à la réalisation de cette grande première à Mirebalais.

Edouard Paultre, secrétaire exécutif du CONHANE, et Rony Desroches ont convenu que la foire a été une réussite. Les organisateurs ont fait remarquer qu’il y a eu une forte présence des hommes d’affaires et des représentants de l’Etat. C’était pour eux l’occasion de mettre à nu le département du Centre aux yeux des investisseurs. « Le travail ne s’arrête pas là », prévient M. Paultre, qui annonce une véritable croisade en faveur du crédit en milieu rural, surtout au niveau du Plateau central, qui offre à lui seul 129 rivières, 13 grottes et cinq communes frontalières. 

 

 

Avec Lima Soirélus

Ils n’aident pas seulement les enfants à traverser les rues…

 
Éparpillés dans les rues de l’aire métropolitaine, ils portent des maillots jaunes avec la mention « Aksyon Sivik » inscrite dessus en couleur verte, et des pantalons ou jupes noirs. Ils se servent d’un bout de PVC blanc glissé à l’intérieur d’un morceau de tissu rouge marqué : « Stop » en blanc, le tout formant un drapeau qu’ils tiennent par la main gauche pour aider les gens, particulièrement les enfants, à traverser les rues. Quiconque fréquente les rues de la capitale à pieds ou en voiture entre 6 h 30 et 8 h 30 a.m. ou entre 1 h et 3 h p.m., les a déjà remarqués. On les appelle par le nom du travail qu’ils font : ACTION CIVIQUE.
 
 
C’est le ministère de la Jeunesse, des Sports et de l’Action Civique (MJSAC) qui est responsable de ces jeunes âgés de 18 à 26 ans. Conscient des graves problèmes économiques auxquels font face les jeunes des deux sexes et dans le souci de les aider à aller à l’école et/ou à s’orienter vers une carrière professionnelle ou universitaire, le ministre de la Jeunesse, M. Evans Lescouflair, alors secrétaire d’Etat, avait créé en 1997, cette brigade scolaire d’action civique.
 
Plusieurs responsables de la direction d’action civique de ce ministère soutiennent que ces jeunes bénéficient d’une allocation mensuelle destinée à couvrir leurs frais scolaires. d’ailleurs chaque brigadier doit rendre des comptes sur son parcours scolaire à la fin de l’année. « L’allocation accordée doit servir à sa formation académique, professionnelle, technique ou universitaire », lit-on sur un papier daté de novembre 2008, lors du dernier recrutement de ces jeunes.
 
Interrogés sur leur responsabilité, plusieurs d’entre eux ont affirmé qu’à part aider les enfants et toutes autres personnes en difficulté – personnes âgées, handicapées, femmes enceintes – à traverser les rues, ils participent à des activités sociales, des activités de reboisement, d’assainissement et de sensibilisation. Ils ont également comme responsabilité de venir en aide à la population, lors de catastrophes naturelles.
 
Un grand nombre d’entre eux se sont aussi penchés sur les difficultés rencontrées au cours de leur travail : des chauffeurs qui n’obéissent pas, les insultes de certains piétons, et les mauvais traitements de leurs supérieurs. Cependant, Maggy et Stevens (noms d’emprunt), deux jeunes brigadiers de Delmas, plus longuement interrogés, ont plutôt lié leur principal problème à l’allocation reçue.
 
Ils gagnent 1960 gourdes le mois, une somme que les responsables n’assimilent pas à un salaire – d’ailleurs c’est en dessous du salaire minimum, mais à « un bon » d’encouragement.
 
« Beaucoup d’entre nous font vraiment ce qu’on demande de faire avec cet argent, mais parfois nous n’arrivons pas à l’avoir à temps; parfois il se passe deux à trois mois sans qu’on le reçoive, et l’école ne va pas attendre », a déclaré Stevens, reconnaissant que l’initiative est très bonne mais le traitement qu’ils subissent mérite d’être corrigé. Stevens est malgré tout très content d’avoir intégré ce corps, car il affirme avoir eu peu de moyens pour poursuivre ses études après le Bac, ainsi, avec ce qu’il gagne, il a pu se faire inscrire dans une école commerciale pour étudier la comptabilité. « Mais pour beaucoup de jeunes que je connais, ce qu’on donne ne suffit même pas pour payer les frais scolaires », a-t-il ajouté.
 
« C’est très peu, mais à ne rien gagner du tout, on préfère encore continuer », soutient Maggy, qui attire l’attention sur le fait que beaucoup d’autres jeunes souhaiteraient être à leur place, mais n’ont pas eu ce privilège. « Tous les jours, des jeunes des deux sexes viennent nous demander comment s’y prendre pour intégrer ce corps; ils nous questionnent sur les prochaines inscriptions; ça nous redonne le courage de continuer », a-t-elle poursuivi, soulignant que chaque année les autorités promettent d’augmenter la somme, ce qui n’est jamais fait.
 
Notons que la brigade scolaire d’action civique du MJSAC a été relancée et restructurée depuis le début de l’année 2009. Pour pouvoir relancer cette brigade, la Direction d’action civique du MJSAC avait organisé un concours d’admission. Plus de cinq mille jeunes s’étaient inscrits, y compris les anciens brigadiers, mais seulement 6 00 d’entre eux ont été retenus après avoir reçu une formation en premier secours, sur la circulation et sur la citoyenneté. Le volet citoyenneté, quant à lui, était axé sur l’éducation à la citoyenneté, à l’environnement, à l’égalité des sexes, aux droits et devoirs du citoyen. Ce qui leur permet de jouer un grand rôle dans la gestion des risques et des désastres, aux côtés des instances concernées pendant les saisons cycloniques.